Cela faisait quelques années qu’on ne l’avait plus vu mais il est de retour en 2014, et en pleine forme, je veux parler de l’enfant terrible du climat: el nino. Bon il n’avait pas totalement disparu puisque c’est un phénomène cyclique (d’une périodicité de 6 à 10 ans) mais il devrait, cette année, être particulièrement virulent!
Tout d’abord un petit rappel: el nino (littéralement courant de l’ »Enfant Jésus », car il apparaît peu après Noël), désigne à l’origine un courant côtier chaud au large du Pérou mettant fin à la saison de pêche. Il désigne maintenant, par extension, un phénomène climatique particulier qui se caractérise par des températures anormalement élevées de la surface de l’eau (environ 10 mètres) dans la partie Est de l’océan Pacifique Sud (bien visible sur la carte ci-dessus).
Techniquement, el nino est la conséquence régionale d’une perturbation dans la circulation atmosphérique entre les pôles et l’équateur. Son apparition déplace les zones de précipitations vers l’Est de l’Océan Pacifique et empêche la remontée d’eaux froides le long de la côte de l’Amérique du Sud, ce qui coupe la source de nutriments pour la faune de ces eaux et nuit considérablement à l’industrie de la pêche. Sans que l’on soit encore capable d’expliquer toutes les relations physiques, el nino a le pouvoir de dérouter les cyclones tropicaux de leurs routes habituelles, de déplacer les zones de précipitations et de sécheresse ainsi que de modifier localement le niveau de la mer par le changement de la pression moyenne. Il n’est donc pas à prendre à la légère…
Le point positif par rapport à el nino c’est qu’il est prévisible, plusieurs mois à l’avance. Le point négatif c’est que cette année les météorologues sont de plus en plus convaincus qu’il sera particulièrement fort, car, à plusieurs mètres sous la surface de l’Océan Pacifique, on observe des masses d’eau exceptionnellement chaudes:
La zone rouge représente une énorme masse d’eau chaude (de la taille des Etats-Unis) qui se trouve aujourd’hui à une centaine de mètres sous la surface. Les alizés (actuellement inversés, une autre facétie d’el nino) poussent cette nappe vers l’Est et vers les zones d’upwelling, où les eaux remontent à la surface. Et c’est dans ce cas de figure précis, lorsque ces eaux entrent en contact avec l’atmosphère que les dérèglements climatiques interviennent…
Le dernier grand épisode el nino est celui de l’hiver 1997-98, responsable du pic de chaleur planétaire qui reste le point d’orgue du réchauffement climatique contemporain. A contrario, ces dernières années étaient plutôt sous la coupe de « la niña », petite sœur « miroir » d’el nino, ce qui explique en partie le ralentissement du réchauffement climatique et le retour à des hivers froids classiques dans l’hémisphère Nord.
Actuellement, l’eau est d’une température égale à celle de ce pic de 1997-98 qui avait engendré environ 35 milliards de dollars de dégâts et la mort de 23 000 personnes (source: Université de Nouvelle-Galles du Sud).
Si el nino nous rend visite (ce qui n’est pas encore tout à fait certain) on peut s’attendre à des conséquences importantes sur les sociétés du pourtour de l’Océan Pacifique: la sécheresse actuelle en Indonésie serait amplifiée, ainsi que les violents incendies qui ravagent l’Australie. Par contre, la Californie qui est actuellement sujette à de fortes sécheresses pourrait voir ses prières exaucées avec l’arrivée de précipitions importantes. Le tout étant qu’elles ne le soient pas trop et n’aboutissent pas aux importantes inondations concomitantes d’el nino lors des hivers 1982-83 et 1997-98…
Un article un petit peu catastrophiste cette semaine, mais on se rassure facilement en gardant en mémoire la grande exactitude de la science météorologique…
Je viens de découvrir votre site, il m’a été conseiller par Daniel. Je trouve cet article sur « El Nino » très intéressant, je m’ intéresse à la météo et je suis indigné du peu de décision en faveur du climat de notre planète de la part des politiques. Vous donner des chiffres affolant sur les conséquences de El Nino et le phénomène va s’amplifier si nous continuons de tous polluer. Amicalement Odile
El Nino est un phénomène naturel mais il est vrai qu’il aura tendance à amplifier les aléas climatiques exacerbés par le réchauffement climatique (dont on est, cela ne fait plus de doute, en partie responsables). Une piste pour agir au niveau des décisions politiques: la consultation publique relative à la stratégie Europe 2020, dont un des grands thèmes concerne le climat et l’énergie (http://ec.europa.eu/europe2020/public-consultation/index_fr.htm).
Super intéressant ! A la fois concis et précis . Bravo !